LES ACTES et mentions INSOLITES DES REGISTRES D’ETAT CIVIL
    
 

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L'hiver rude et la cherté des denrées en 1709 provoquèrent une terrible famine en 1709  dans toute la France et une augmentation des décès durant 2 années consécutives, parfois du simple au double . L'année 1710 fut elle aussi remarquable par le nombre de décès élevé , malgré une récolte correcte cette année-là. Les historiens pensent que l'affaiblissement d'une population touchée par le froid , la famine et la pauvreté de 1709 , engendra de nombreuses maladies qu'une disette encore présente en 1710 rendit plus meurtrières.

Ainsi , à Herment (Puy de Dôme ) où l'on comptait en moyenne 15 décès par an, il y a 28 décès en 1709 et 36 en 1710 .
A Fontaine Raoul (Loir et Cher) où l'on compte aussi une moyenne de 15 décès par an, il y a 22 décès en 1709 et 31 en 1710 .

(voir hiver 1709 sur ce site )

 

Le prix des denrées grimpa surtout en 1709 .

d'après le témoignage du cure de Mulsanne (72) détaillé plus bas ,
le blé subit une augmentation régulière jusqu'à la nouvelle récolte de 10 sols le boisseau (mesure du Mans ) avant le froid  jusqu'à  6 ou 7 francs en juin-juillet 1709 .

Le vin, selon le même témoignage , passa de 12 ou 15 livres la pipe à 100 ou 120 livres.

D'après les Archives de l'Yonne, " en 1707, le boisseau de blé vaut 8 sous, 20 en 1708. En 1709, la récolte est particulièrement mauvaise et l'hiver d'une rare rigueur : le boisseau de blé coûte alors 62 sous, son maximum sur le siècle"  (voir)

 


Prix du froment au marché de la Saint-Michel à Tours et à Montbazon, entre 1701 et 1714
source : "Les campagnes de Touraine au XVIIIe siècle"
 
Même le blé semé à l'automne ne survivra pas au froid extrême et les semences de céréales devinrent précieuses . 
Le roi dut prendre certaines mesures dès le mois d'avril 1709 . Ainsi, il obligea ceux qui détenaient des grains d'en faire la déclaration exacte  (voir les déclarations du roi en 1709)

"le Roy obligea ung chacun de faire declaration de ce que chaque particulier avoit de ble
sur peine de mort et de galere tant pour les eclesiastiques que pour les laicques
" (paroisse de Courceboeuf (72))

Cette même année, il fut autorisé de manger de la viande en période de carême dans le diocèse de Lyon ,  ce qui était exceptionnel. (voir sur ce site "les dispenses de carême" )
Ainsi en témoigne le curé de Haute-Rivoire (69) qui précise que c'est grâce aux blés produits en Auvergne que la région lyonnaise échappa à la famine .
"En l'année mil sept cent neuf l'on mangea de la viande dans le diocèse pendant le careme (...) sans la province de lauvergne dont on tiroit le blé, lon seroit mort de faim

La pauvreté devint extrême et les gens commencèrent à mourir de faim.
Dans la paroisse de Lamure (Rhône) :
"L'an que dessus le seizieme febvrier aussi inhumée dans ce cimetiere de lamure par moy soussigne estiennette lafont dubergier age d'environ cinquante ans laquelle est morte de la faim(...)"
L'acte juste après est identique , le prénom de la défunte n'étant pas inscrit : " gouion agée d'environ quarante ans morte de faim"


Le curé de La Chapelle d'Aligné (72) écrit le contenu de " l'ordre pour soulager les pauvres" et les consignes instaurées par le roi.

"Depuis le 15.fevrier 1709 jusques au 15.juillet
de cette meme Année le Roy et son parlement de
paris nous envoia dix ou douze differens edits , les uns
pour en gager à ceux qui avoient des grains pour semer
a le vendre , ou le prester ou a semer eux memes les
champs delaissés par plusieurs privileges a eux accordés
ce qui eue un tres bon effet; Les autres etoient en faveur
des pauvres. Ils ordonnoient que tous les --- pairoient
sur les deux-tiers du revenu au sol la livre, pour
la subsistence des pauvres, dont on feroit en chaque
paroisse un catalogue, et a qui on donneroit chacun par
jour une livre de pain, ce qui se fit depuis le
15. may jusques au 15.juillet, on achetoit la

livre de pain noir deux sols six deniers, en plusieurs
endroits les voyageurs nen trouveoient pas a acheter,
(...) "

 

La pauvreté est telle que les plus pauvres en viennent à manger des cadavres d'animaux "les plus puants" :
Paroisse de Paray-le-Frenil (03) -1709
" Il est mort grand nombre de gens de faim et les maladies ont fait et font encore perir beaucoup de gens que la disette n'avoit pas attaquee. La famine est si grande que les herbes ayant manquees par lhiver les charognes les plus puantes sont ramassees et mangees par les pauvres mesme jusqu'aux animaux morts de maladie contagieuse"

Ad03-Paray-le-Frenil BMS 1692-1792 vue56

 

La population s'appauvrit en payant les denrées un prix très élevé ... excepté Jean Rheau de la paroisse de Gannay-sur-Loire (03) qui préféra "endurer la faim que d'achepter du pain" et qui mourut "extenué de faim" alors qu'il avait de l'argent!

" Le trent un  juillet 1709 jay enterre au cimetiere qui mourut hier
apres avoir receu le sacrement de --- Jean Rheau
laboureur, lequel mourut extenué de faim ce croit un ---
bon laboureur fort sage , apres sa mort j'ay seu quil avoit
de l'argent et aimoit mieux endurer la faim que dachepter
du pain fait en presence de Jean Rheau son cousin (...) "

 

 

 

 

 

 

 


Ad69 Lamure BMS1710

 


Ad72 La Chapelle d'Aligné BMS1700-1709 vue194

 

 

 

 

 


Ad03- Gannay-sur-Loire Bms 1654-1780 Vue 258

 

La solidarité s'organise , telle que la décrit le curé d'Albigny (69) , en 1709 :
"Mr de --- trésorier de france fit de grandes aumones aux habitants de ce lieu (...)
madame son épouse nourrit pendant cette misere quantité de pauvres femmes et d'orphelins "

Ad69-Albigny BMS 1709  

 

 
L'année 1710  fut , semble-t-il ,  plus fertile en moisson

C'est au moyen d'un poème que cette année est résumée par le curé d'Avoise (Sarthe) :
"Dans lan mil sept cent dix la moisson abondante
adoucit un peu nos malheurs.
Sans neanmoins tarir les pleurs
que tira de nos yeux une guerre senglante
mais la mortalité beaucoup plus affligeante
fut enfin ce qui mit le comble a nos douleurs"


Cependant , comme nous l'avons vu, la mortalité en 1710 fut très élevée . 


Sources : "Constitution, histoire et avenir des caisses d'épargne de France ..."

Voici les données pour Feings (Orne)


Sources: "Le magasin pittoresque ..."

 

 

 


Ad72 Avoise Bms 1700-1721 vue133

 

 

 

 

 

Si la famine fut un peu moindre en 1710 , ce sont surtout la pauvreté, les maladies causées par le froid et la malnutrition qui décimèrent la population.

L'année 1710 à Vincelles (Yonne)

" Divers annottations
Peut etre serez vous surpris mon cher lecteur
de ne voir dans ce registre que des morts vostre
etonnement cessera si vous remarqué que sest celuy de
1710 année dans laquelle il sembla que le seigneur
vouloit enfaim tirer vanance de lhomme pecheur et le perdre
par une disette de bled il valoit dans cette année en ce
pais jusqua 20 et 25 francs le pichet . Le pauvre
peuple vandoient jusqua leurs chemises pour se nourire
Lon voyoient les hommes et femme enfans petit et grands
le visage et les mains terreux raclant la terre avecq les
ongles cherchant certaines petites racines quils devoroient
lorce quils en avoient trouvé Les autres moins industrieux
paissent lherbe avecq les annimeaux Les autres entierement
abbatues etoient couché le long des grands chemins et atendoient
ainsi la mort, ceux meme qui paroissent les plus aisé
etoient ceux qui souffroient davantage faute de payement.
Les rentes de lhotel de ville furent retranché, les curés
etoient trop heureux de vivre de pain tel quelle Le vin
etoient or de prix Les vignes ayant eté gelee jusque dans la terre
l'année precedente . Lon ne vecu que dorge ou le pauvre
ne pouvoit attindre car il valoit encor 8 et neuf francs le
bichet Lon en voioit pas encor de bled ceux qui en avoit
le conservoit pour le seumer et moy meme je vous avouray
que quant jen voyois cela me fesoit un tel plaisire quil
sembloit que je navois rien veu de plus beau cependant
quand touttes les semainlles furent faites le graind
diminua tout a coup je veux dire longe et lon commanca
un peu a manger du pain a la verité fort pauvre mais
a meilleur marché, mais quel gains pour les pauvres
qui avoient tout vendues et n'avoient plus de quoy faire ce
peu d'argent Quantité d'ames charitables supleerent a
ce deffauts Je receu a ma part plus 20 ecus daumolne
Je ne puis laisser passer sous silance ce que jay regardé comme
un miracle qui que les pauvres mouroient comme des betes
jamais lon na moins entendu parlé de meurtre d'assasin
ny de volle Les chemins etoient surent au milieu
de cette grande disette .
Les bleds que lon voyent parfaitement beaux ou ils y en a eu
de seumé rendre la joye aux coeurs et lon commenca
a revivre finissant cette année.
Prions le Seigneur quil
nous preservent de revoir
jamais de pareilles temps "

Ad89 Vincelles Bms1701-1740 vue61

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




 

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